la Moussaye en Plénée

                                                                                                                         

                                                                                                      


La Moussaye par Michel Lescouët

C’est le fils de Guillaume, un certain Olivier qui porta le premier le titre de seigneur de la Moussaye, et se retrouva pourvu du domaine de la Moussaye à Plénée et de la Rivière Moussaye à Sévignac.

 

ancien château de la Mousaye - côté de la cour

 

Armes de la Moussaye                                                                                          Armes Gouyon

 

Gervais de La Moussaye l’un de ses descendants fit une donation à Boquen en 1264, Bertrand qui semble être le petit fils de Gervais vivait en 1370, il épousa Isabeau de Plumaugat. Leur fils Guillaume de La Moussaye se maria deux fois, d’abord à Ollive du Margaro, de la dite maison en Rouillac, puis à Jeanne Maimbier. C’est par le premier lit que se poursuivit la filiation de la maison qui nous intéresse.

Guillaume II de La Moussaye, fils d’Ollive du Margaro eut lui-même pour fils Amaury de La Moussaye, qui était échanson et chambellan du duc François, et Grand Veneur de Bretagne en 1443. Les montres nobiliaires pour la paroisse de Sévignac le donne déjà en 1428 à la Rivière Moussaye. Tout laisse penser que le château de la Moussaye en Plénée fut abandonné après la guerre de Succession de Bretagne à la fin du XIVème siècle et que durant près de deux siècles, la Rivière Moussaye en Sévignac devint alors l’une des résidences favorites de la famille de La Moussaye et de ses héritiers. Amaury II de La Moussaye, fils du précédent,  possédait aussi à Sévignac « la maison de la Guehenuxhaye » autrement dit la Guénochais, où il subsiste en ce village les restes d’une tourelle et l’emplacement de douves comme nous le verrons à l’article consacré à cet endroit. La montre de 1475 ajoute que Dom Bertrand Guéhenneuc, était « prestre en sa trêve ». ce qui atteste la présence d’une chapelle à la Rivière-Moussaye, thèse corroborée par une parcelle désignée la Chapelle. Amaury II de La Moussaye laissa deux enfants : François dont le fils Jacques mourut dans un duel à l’âge de 21 ans, et Gillette qui épousa en 1506 Guy Gouyon. Jacques, fils des précédents épousa Louise de Châteaubriant puis Marie Loizel. 

Amaury I Gouyon fils de Louise de Chateaubriant, nous est connu à travers les mémoires que laissa son fils Charles. Né en 1532, Amaury I Gouyon, se maria trois fois. C’est de son union avec Catherine de Guémadeuc que naquit en 1549 Charles Gouyon. Charles Gouyon auteur d’un manuscrit  laissé à sa postérité. Cet ouvrage connu sous le titre de  « Mémoires de Charles Gouyon, baron de la Moussaye 1553-1587 »  a été rédigé par G. Vallée et P.Parfouru et a été  publié en 1901. On apprend comment le jeune Charles Gouyon page à la Cour de Catherine de Médicis s’y prit afin de courtiser celle qui allait devenir un jour la mère de ses enfants : Claude du Chastel.

A  priori,  rien n’aurait dû empêcher le mariage entre les deux jeunes tourtereaux, si ce n’est que Charles était catholique et Claude protestante.  Pourtant,  contre vents & marées,  alors que son père bien-aimé menaçait de le déshériter,  Charles se convertit  à la Religion Réformée, et écrit il : « Le 20me jour du moi de may 1571, nos nopces furent faictes. Ma maîtresse fut habillée dans la chambre de la Royne mere, et croy qu’elle avoit pour plus de deux cent mille escus de pierreries sur elle, y ayant celles de la couronne. Le Roy la conduit par la main jusque à la porte de la chapelle du chasteau tout joignant la salle haute de Gaillon… »

L’année suivante,  le 18 août 1572 se déroula le mariage d’Henri de Navarre avec la fille de Catherine de Médicis, Marguerite de Valois. Ami du Béarnais,  Gouyon fut convié au mariage, il s’y rendit et revint dès le lendemain afin de rejoindre sa belle  restée à la Rivière-Moussaye. Cinq jours plus tard, l’effroyable massacre de la Saint-Barthélemy était ordonné par Catherine de Médicis.

 

Le massacre de la Saint-Barthélemy

 La plupart des protestants présents dans la capitale furent massacrés. Charles Gouyon eut connaissance des faits à son retour à Sévignac : 

« Sur ces entrefaites, la journée Saint-Barthélemy avint, et lors ma chère femme et moy estions à la Rivière, où environ la minuict, nous en eusmes lettre pleine d’effroy, car on disoit partout le royaume les huguenots, (qu’ils appeloient). Cela nous fit fermer les portes. J’avois alors de bons chevaux et six ou sept bons hommes et puis beaucoup d’amis ; cela me rasseura et mesme ma chère  femme, laquelle employe la plupart deu temps en prière et oraison à Dieu… » 

Six enfants naquirent de l’union de Charles Gouyon et Claude du Chastel, certains virent le jour à la Rivière-Moussaye d’autres à Plouer, autre résidence possédée par le couple. 

L’année 1582 fut sans doute  « l’annus horribilis » pour Charles Gouyon, d’abord le duc de Mercoeur ennemi déclaré des protestants,  fut nommé gouverneur de Bretagne et puis le 21 octobre de cette année là, s’éteignit à la Rivière-Moussaye Amaury Gouyon, père bien aimé de notre chroniqueur, il nous en a laissé un passage émouvant : 

« …Aussy tost qu’il fut arrivé céant, il se fit porter en la chambre de ma chère femme, où il se réjouit de la voir sy bien se porter et mère deux fils vivants, car il y en avoit deux morts, à sçavoir les deux aînés. Ma chère femme au contraire, s’attriste de le voir sy déffaict avec une douleur sy mauvaise. S’estant faict porter dans sa chambre et mettre au  lict, il commença à discourir de plusieurs affaires ; je ne le trouvai jamais de sy sain entendement, ny de meilleurs propos. Il se pleigneoit de dévoiement d’estomach ; ma femme lui faisoy tout le secours  qu’elle pouvoit par ses demoiselles, et donne ordre d’envoyer querir Mr Besançon, médecin ; et l’attendant, on avoit faict venir un apothicaire de Lamballe. Mon père changea de chambre et tous ses discours estoient toujours tenant la mort, asseuroit estre content de la présente vie et qu’il estoit disposé de la laisser sans aucun regrets qu’en ma femme et moy ; toutefois, il s’éjouissois et consoloit en nous. Et combien je luy remontras se que je l’avoys veu plus mal une fois, que mesme j’avois esté bien en d’autres dangers, cela ne servois de  rien, car il alléguoit d’autres raisons qu’il n’en  pouvoit relever ajoutant derechef qu’il n’avoit aucuns regrets en cette vie et présente lumière, ne désirant plus jouir que du repos aeternel et vie coeleste. Trois jours après qu’il fut arrivé, il demanda à se lever, s’estant esveiller comme en sursaut ; il ne recognut plus ses gens, leur demandant qu’ils estoient, il commenda qu’on le levast de sa chaire ; y estant, il commenda au prêtre qu’il priast Dieu, lequel incontinent le fist, les prières estant finies, ils les fit recommencer et commenda qu’on m’envoya quérir et qu’il vouloit estre porté en ma chambre. Je fus incontinent à luy et le trouvay en sa chaire, comme s’il s’eust reposé ; mais je vei bien qu’il vouloit rendre l’esprit, car il ne remuoit plus et n’estoit presque possible luy voir prendre haleine. J’envoyay quérir de l’eau de canelle et luy donnay une ceuillerée ; lors il revint comme s’il se fust éveillé. Je luy demanday s’il vouloit estre porté en ma chambre, il me répond qu’ouy, je luy fis porter, et le voyant en cet estat, je me retiray en mon cabinet pour prier Dieu pour luy et pour le salut sde son âme. Je redescens et le trouvay en sa chaire auprès du feu ayant la teste appuyée sur la main d’un de ses gentilhommes, où il mourut sans que le dit gentilhommes s’en aperceust ; et son deceix m’aporta une extresme afliction… »

  

 

Catherine de Champagné,  marquise de la Moussaye et à droite son fils Amaury III

 

L’un des six enfants de Charles Gouyon et Claude du Chastel fut Amaury II,  né en 1577  il demeurait la Rivière-Moussaye à Sévignac quand il épousa  le 12 avril 1600  Catherine de Champagné,  de leur union naîtrons trois enfants : Amaury III ci-dessous ; François, baron de Nogent, et Brandelis,  baron de Juch + Hollande. 

Quatrième comte de Plouër, Amaury III, fils des précédents naquit en 1601, élevé à son tour dans toute la rigueur de la religion réformée, il épousa le 11 avril 1629 à Sedan, Henriette de la Tour d’Auvergne, princesse de Sedan –sœur du maréchal de Turennes. 

La marquise Henriette de la Moussaye  et son mari entreprirent à Quintin la construction d’un  château et  de fortifications que Louis XIV fit arrêter.  

Le marquis et la marquise de La Moussaye  organisèrent des prêches à Quintin, ce qui ne manqua pas d’inquiéter l’évêque de Saint-Brieuc, Denis de la Barde.  Il fit fermer ce prêche, mais la marquise ne voulant pas céder en ouvrit un second dans un lieu retiré, proche de la forêt mais l’évêque ne transigea pas. C’est sur les marches du Parlement de Bretagne que  Mgr de La Barde rencontra madame de La Moussaye,  celle-ci agacée par l’ecclésiastique  l’injuria et le gifla. L’affaire était grave, mais l’évêque accepta les excuses de la marquise et on en resta là. 

 

Portrait de monseigneur Denis de la Barde

 

C’est en 1665 qu’Amaury III de la Moussaye s’éteignit, sur les neuf enfants que lui avait donné son épouse, ne restaient que deux filles : Elisabeth et Marie. Elisabeth épousa en  1669 le calviniste René de Montbourcher.

 M. de Montbourcher s’était illustré au service du Roi  de France, le 4 novembre 1673, il avait reçu le régiment de cavalerie de Culan ; puis il avait combattu d’abord à Mulhausen  et à Turkeim, Haguenau…. 

Résidants au château de la Moussaye en Plénée, M. le marquis et sa femme, préférèrent fuir la France  lors de  la révocation de l’Edit de Nantes.  Elisabeth, son époux et sa sœur Marie quittèrent la France pour la Hollande en abandonnant leur bien. Ils furent arrêtés près d’Avesnes, en limite de la frontière Belge,  par des paysans chargés de barrer la route aux émigrants. Une bagarre éclata, M. de Montbourcher tua l’un des paysans et  madame la marquise fut blessée. Montbourcher fut incarcéré à Lille, sa femme à Cambrai et sa belle-sœur à Tournai. Voyant qu’il n’y avait plus aucune issue,  Montbourcher accepta de se convertir, Marie demeura inflexible, pour avoir une nouvelle fois  essayé de s’enfuir, elle fut enfermée un temps à la Bastille, puis  expulsée en Angleterre où elle mourut en 1707. 

René de Montbourcher fut nommé en 1688 maréchal de camp, il fut tué cette même année lors du siège de Philippsburgh.  

 

Siège de Philippsburgh

Ce sont  les époux Montbourcher qui entreprirent la réfection de la nef à la chapelle de Saint-Cado. Voir St-Cado. Madame la marquise se retrancha à La Moussaye où elle vécut retirée du monde. Elle abjura le protestantisme le 17 avril 1701 alors qu’elle était très malade. Le dimanche suivant, elle reçut l’extrême onction et s’éteignit à La Moussaye âgée de 63 ans, le 17 mai 1701 vers sept heures du matin.

Dans le Registre des décès de la paroisse de Plénée on peut lire :

« Haute et puissante dame Elisabeth Gouyon, dame marquise du Bordage, s’étant retirée tout à fait du monde depuis quelques années, pour penser plus sérieusement à son salut, abjura la religion prétendue réformée le 17 avril 1701 entre les mains de son curé par permission du seigneur évêque d Saint-Brieuc son prélat ; entendit la sainte messe le dimanche immédiatement suivant, communia et reçut l’extrême onction, mourut saintement le 17e mai sur les sept heures du matin dans son château de La Moussaye, âgée de 63 ans et fut inhumée dans l’église de Plénée le 19 sans autre pompe ni magnificence qu’une grand- messe. Affluence du peuple. » René de Montbourcher et Elisabeth Gouyon eurent deux enfants : René Amaury de Montbourcher, (1670-1744), marquis du Bordage, arrêté en même temps que ses parents, on le ramène à Paris où il est placé au collège Louis Le Grand, il abjure entre les mains du Père lachaise, confesseur du Roi, célibataire, il meurt le 19 mars 1744 à Paris. et Henriette de Montbourcher (1671-1751), arrêtée aussi avec ses parents, elle fut ensuite confiée à madame de Miramion,  le 4 décembre  1699 elle épouse François de Franquetot, duc de Coigny, Maréchal de France (+ 1761).

 

Jean Antoine François de Franquetot, né le 27 septembre 1702 fut Gouverneur et grand bailli de la ville et du château de Caen.  

Armes Franquetot de Coigny

Promu général des dragons et maréchal de camp en 1734, il fut tué en duel par le Prince de Dombes, fils du duc du Maine –bâtard de Louis XIV & de madame de Montespan.

Au cours d’une partie de jeu avec le Prince de Dombes, Coigny aurait déclaré à propos de son adversaire : « il est plus heureux qu’un enfant légitime. ». 

C’est le 4 mars 1748 sur la route de Versailles que le duel se déroule aux flambeaux, Coigny blessé à mort est replacé dans son carrosse de telle manière à laisser croire qu’il serait mort accidentellement. 

En 1769 Marie François Henry   Franquetot, duc de Coigny possède la seigneurie et toutes ses terres,  le domaine qui s’étend sur les paroisses de Plénée, Sévignac, Le Gouray, Tramain et Dolo comprend 16 maisons et métairies –dont faisait partie La Rivière-Moussaye. Le domaine sis en la paroisse de Sévignac relevant du fief de Beaumanoir-Limoëlan.

 

                                   Duc de Coigny

Le 3 mars 1782, la seigneurie est vendue par Marie François Henry   Franquetot, duc de Coigny, pour la somme de 432 000 l. au comte Jacques Joseph de La Motte de Broons de Vauvert, lequel réside à Sévignac et manifeste peu d’intérêt pour La Moussaye.

« Jacques Joseph  de La Motte, décédé à Broons, à l’âge de 59 ans, chef de noms et d’armes, chevalier comte dudit nom, issu de la Maison de Broons, seigneurie de Dinan, sge de Vauvert, Marquis de la Moussaye, chevalier de l’ordre royale et militaire de Saint-Louis, époux de  feue Angélique-Jertrude-Joseph-Emmanuelle Legrand, comtesse de la Motte de Broons, décédée au château de La Moussaye, fille de Louis & Marie-Josephe-Barbe-Antoinette-Michelle  de Los Rio y Abregon, ledit Jacques Joseph  de La Motte a été inhumé en présence de Jean-Marie de Gaudemont, sgr de la Montfornière, et de messire Jan du Rocher, Sieur du Margat, à Plénée le 6 décembre 1789. ». 

C’est le 16 juillet 1771 à l’église St Melaine de Morlaix que Jacques Joseph de La Motte de Broons de Vauvert avait épousé Angélique-Jertrude-Joseph-Emmanuelle Legrand, cette dernière était née vers 1749 à Mexico.  De leur union naquirent deux fils : Jean Louis Jacques Ange de La Motte de Broons de Vauvert 1772-1853 ép. . Marie-jeanne Aubert du Lou ; et Jeanne Sainte Angélique  de  La   Motte  de Broons de Vauvert, ° 1775.