L'horloge de grand-mère

                                                                                                                         

                                                                                                      


C'est une horloge en châtaignier,

Au long coffre à la mode antique,

Que dut longuement travailler

Quelque Michel-Ange rustique

 

Au bas, le sonneur de biniou

Fait face au sonneur de bombarde,

Durant qu'au fronton un hibou

De ses grands yeux ronds vous regarde.

 

Oh ! combien cela me charmait,

Quand j'étais tout petit, de suivre

La mort des heures, que rythmait

L'énorme balancier de cuivre;

 

Car vraiment, lorsque près d'un seuil,

On contemple une horloge-close,

Elle a tout l'air d'un long cercueil

Où le temps, qui n'est plus, repose !

 

La première heure que chanta

L'horloge de sa voix profonde

Fut celle où grand' maman jeta

Son premier cri dans ce bas-monde,

 

Et ce fut ce dong éclatant

De demi-heure en demi-heure

Qui régla, dès lors, chaque instant

De ta vie, ô toi que je pleure !

 

Dong ! Dong ! elle sonnait ainsi

Et l'heure grave et l'heure folle,

L'heure des jeux et l'heure aussi

Où partait l'enfant pour l'école 

 

Dong ! Dong ! le moment du réveil,

Puis l'heure où l'on se met à table

Dong ! Dong ! le moment du sommeil

Quand passe le jeteur de sable

 

Dong ! Dong ! l'heure où, pour le saint-lieu

On part, en bande, le dimanche

L'heure où, pour recevoir son Dieu,

Plus tard, on met sa robe blanche

 

Dong ! Dong ! la prime-aube du jour

Où l'on va travailler la terre,

Et puis l'heure où gémit d'amour

Le cœur las d'être solitaire 

 

Dong ! Dong ! les instants si joyeux

Où les petits gâs apparaissent;

L'heure digne où s'en vont les vieux

Pour faire place à ceux qui naissent 

 

Et la femme en âge avançait,

Devenait maman, puis grand'mère...

Et l'horloge aussi vieillissait

À tant sonner l'heure éphémère

 

Et grand' maman allait, venait

Chaque jour de plus en plus frêle

Et l'horloge sonnait, sonnait,

D'une voix de plus en plus grêle

 

Quand de Grand' maman la raison

Sembla, pour toujours, endormie

L'horloge à travers la maison,

Sonna l'heure pour le demie 

 

Et grand'maman, dans son lit-clos,

Agonisa, puis se tint coite

Et ce furent de longs sanglots

Que pleura l'horloge en sa boîte

 

Enfin, dans le lit, un soupir

Et le grand balancier de cuivre

S'arrêta d'aller et venir

grand' maman cessa de vivre

 

Et grand'mère auprès des élus

Est montée avec allégresse

Et l'horloge ne sonne plus

Elle est morte aussi de vieillesse

 

Morte à jamais, c'est vainement

Qu'un grave horloger l'interroge 

C'était le cœur de Grand' maman

Qui battait dans la vieille horloge 

 

Paroles et musique de Théodore Botrel

 

 

 

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