I
Petit
Yann, la chose est dite:
Je
l'ai lu sur tes papiers :
Faut
embarquer vite, et vite,
Sur la
frégate aux gabiers.
Que
veux-tu, mon petit homme?
C'est
le sort des matelots :
Dors,
bien vite, un dernier somme
Dans
le creux de ton lit-clos!
Couche
toi, mon gâs,
Dans
ton lit de chêne,
Et
berce, lonla,
Et
berce , lonlaine!
Car
l'heure est prochaine
Où tu
partiras...
Et
berce, ton laine!
Endors-toi,
mon gâs!
II
Je
suis vieux, ta mère est morte,
Tes
deux frères sont partis...
Quand
tu franchiras la porte
Je
serais seul au logis!...
J'ai,
par une nuit pareille,
Jadis,
largué mes bons vieux;
Parts,
ton béret sur l'oreille,
En
chantant un air joyeux!
Embarque
mon gâs,
Sur la
Melpomène,
Et
vogue, lonla,
Et
vogue, lonlaine!
Qu'un
galon de laine
Rougisse
ton bras :
Embarque,
lonlaine!
Et
vogue, mon gâs!
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III
Que
toujours, sous ta vareuse,
Batte
un coeur discipliné
Et,
du ciel, ta mère heureuse
Béniras
son dernier né ;
Puis,
si quelque jour la guerre
Se
rallumait tout à coup,
Comme
je l'ai fait naguère,
Fait
ton devoir...jusqu'au bout!
Et
vas-y, mon gâs,
Sans
peur et sans haine
Mais
cogne, lonla
Et
cogne lonlaine!
Hurle
à perdre haleine
Dans
le branle-bas:
Ce
jour-là, lonlaine,
Cogne
dur, mon gâs!
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