I
A cinq ans l’on n’est encore
Qu’un petit être incomplet
Qu’une fleur qui veut éclore,
Qu’un tout petit oiselet,
C’est alors que notre mère
Joint nos menottes déjà
Et nous dicte la prière
Que sa mère lui dicta !
Près d’une femme chérie
Qui tremble en secret pour nous,
C’est à genoux que l’on prie,
A genoux !
II
A vingt ans l’âme frisonne
D’un trouble encore incertain,
L’est l’Heure d’Amour qui sonne
à l’horloge du Destin ;
Heure impossible à décrire,
Où deux cœurs, à l’unisson,
s’éclairent du même rire,
chantent la même chanson !
lorsque vient l’Aveu suprême,
aveu si grave et si doux,
c’est à genoux que l’on aime…
à
genoux !
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III
mais dans sa couche profonde,
le sort étend nos Amours ;
tête blanche et tête blonde
ferment les yeux pour toujours ;
c’est alors que nous reviennent
les souvenirs de jadis,
que nos lèvres se souviennent
des anciens « de profundis »
tout seuls dans notre demeure
le cœur saignant, les yeux fous,
c’est à genoux que l’on pleure…
à genoux !
IV
Mais il est une autre Femme
Qu’il faut aimer, sans repos,
Qui l’oublie est un infâme,
Qui la sauve est un héros !
Celle-là, c’est la Patrie :
Gardons là de tout danger
Et, si quelqu’un
l’injurie,
Amis courons la venger !
Quand vient l’heure du martyre,
Pour mieux ajuster les coups,
C’est à genoux que l’on tire :
A genoux,
Feu !
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